Comme un cheveu sur la soupe – Russie
PubliÉ le Catégories : Plats et traditions, Russie.
A l’époque de notre séjour en Russie, on avait particulièrement adoré la cuisine locale, ses goûts, sa variété. En même temps, comme on arrivait de Mongolie, on n’était pas très difficile…
Après, on est allés au Japon, où on a connu la régalade que l’on sait. Et depuis, la cuisine russe nous est complètement sortie de l’esprit !
Il n’est donc pas évident de s’y replonger aujourd’hui. Mais la cuisine russe, enfin la cuisine que l’on a découverte en Sibérie et en Extrême-Orient, mérite quand même qu’on s’y arrête.
Alors, à vos papilles, et une fois n’est pas coutume, on va commencer par les boissons !
Bière et vodka
Sauf maladie ou condition personnelle très particulière, il semble qu’il soit inconcevable de ne pas en boire quand on est Russe. A Irkoutsk, notre couchsurfeuse Tania avait décidé, pour des raisons personnelles, de se mettre en retrait de la consommation d’alcool. Et elle nous a confié que cette décision avait soulevé l’incompréhension générale autour d’elle. Arrêter de boire, alors que son corps le lui permettait toujours ? Non, pour ses amis, il devait forcément y avoir autre chose, quelque chose clochait…
C’est sur cette petite histoire personnelle que Tania nous a accueillis, histoire de nous mettre au parfum pour le reste de notre voyage sans doute. Elle nous a aussi expliqué plein de choses sur comment on buvait en Russie.
La vodka, d’abord, qui doit se boire en petits shots avalés cul sec. D’abord, on expire profondément, puis on boit son shot d’un trait, puis on ré-inspire profondément pour bien ingérer toutes les vapeurs d’alcool.
Pour la déguster, la vodka doit être très froide. Sinon c’est vraiment mauvais.
Juste après un shot, on mange généralement un petit pickle, un cornichon, un peu de salade de crudités, voire même de la soupe ou des petits morceaux de poisson cru. Enfin, n’importe quoi de salé en fait, puisque la vodka se boit aussi, et surtout, au cours du repas. Ce qui fait vite défiler le compteur de litres : ainsi, pour une bonne soirée en Russie il faut compter au moins 1/2 litre de vodka par personne !
La bière, quant à elle, a pour vocation de remplir. Au supermarché, les bières sont souvent vendues en grandes bouteilles de 1,5 ou 2,5 L, en faisant une boisson conviviale et peu chère. Parmi les marques que l’on a retrouvées le plus fréquemment dans nos contrées orientales figurent toute la série des Baltika (surtout de la Baltika 3 à la Baltika 9), la Baïkal ou la Zhigulyovskoye, plutôt correcte en pression.
Mais attention, la consommation de bière n’est jamais indépendante de la vodka. Car comme le dit un dicton russe : « une bière sans vodka, c’est de l’argent dépensé inutilement ! »
Alors, après tout cela, devait-on s’alarmer que les Russes aient un grave problème avec l’alcool ? Ou simplement penser qu’ils parlent juste un peu trop ? Un peu les deux sans doute !
Car après l’épisode Tania, pendant tout le reste de notre séjour, on n’a pas trouvé que les Russes buvaient beaucoup plus qu’ailleurs. Bien au contraire.
On a même plutôt été surpris de constater que la boisson numéro 1 en Russie, en tout cas dans les provinces qu’on a traversées, c’est le thé !
Le thé
Le thé se boit toute la journée. Au petit-déjeuner si on ne boit pas de café, en accompagnement du déjeuner ou du dîner, après le repas avec le dessert ou encore entre les repas.
D’après la légende, la tradition du thé est arrivée en Russie par un khan Mongol qui en a fait cadeau au tsar. Mais c’est surtout avec la Chine que le commerce du thé a été florissant dans les siècles suivants.
Aujourd’hui, le thé Russe est majoritairement produit « localement », sur les bords de la mer Noire, dans la région de Sochi. Comme le thé turc produit non loin de là, c’est aussi un thé noir au goût légèrement fumé, et comme en Turquie, il est servi en deux temps : d’abord une dose de thé très concentrée, que l’on dilue à son goût avec l’eau bouillante du samovar.
Enfin, dans la tradition Bouriate, au Sud du lac Baïkal, on boit également du thé au lait salé. Mais disons qu’après en avoir bu tous les jours en Mongolie, on a préféré s’abstenir d’y goûter cette fois !
Le petit déjeuner
On revient maintenant sur la nourriture, et on commencer par le petit-déjeuner russe, sans doute pour nous le moment le moins intéressant de la journée.
Le constituant de base, ce sont les céréales (sarrasin, millet, semoule, avoines, orge, riz…). Ces céréales se consomment soit sous forme de porridge, c’est-à-dire bouillies dans du lait, soit nature, cuites à l’eau. Pour paraître moins fades, elles sont assaisonnées de beurre, de sel et de sucre. Certains mangent aussi du pain et du fromage pour changer des céréales.
Mais clairement, le but recherché du petit-déjeuner n’est pas le goût ! Il s’agit plutôt de faire le plein de sucres lents pour démarrer la journée et endurer le froid.
Un repas traditionnel
Un repas complet russe, tel qu’on peut en trouver dans les nombreuses cantines populaires ou les maisons traditionnelles, se compose à minima d’une soupe et d’une salade. Bien souvent, on y adjoint un plat de poisson ou de viande, avec un féculent et éventuellement des légumes. On termine aussi souvent le repas par un dessert.
Les cantines (столовая – stolovaya) sont les meilleurs endroits pour goûter une authentique et peu chère cuisine russe. Elles fonctionnent sur le principe d’un self et on en trouve dans toutes les villes. Elles proposent toujours plusieurs choix de soupes et salades, quelques plats de viande et de poisson, des desserts, du pain, du thé… Tout cela est en général servi en petites portions, ce qui permet de satisfaire petites faims comme gros appétits.
Les soupes
Hiver comme été, on mange de la soupe. De nombreuses recettes existent, ainsi que des variations saisonnières :
- Le bortsch : une soupe d’origine ukrainienne, à base de betterave rouge avec un peu d’oignon, de carotte, du chou, une pomme de terre et la viande en option…
- Le chtchi : ce n’est pas le nom des habitants du Nord de la Russie, mais le nom de la soupe au chou, qui s’accompagne aussi d’oignon, de pomme de terre, de céleri, d’aneth, de viande mais surtout de produits aigres ou saumurés, comme les cornichons. Cela lui donne une saveur acidulée caractéristique
- La solyanka, un bouillon de viande au goût fumé avec du chou, des carottes, de la crème sûre, des olives, de l’oignon, des cornichons…
- Le rassolnik, un bouillon de viande avec du jus de concombres marinés, des pommes de terre, de l’orge…
- Le lagman, une soupe originaire d’Asie Centrale, avec de la viande d’agneau, des légumes et des nouilles
Toutes ces soupes chaudes et consistantes sont essentiellement consommées en hiver. Lorsqu’il fait plus chaud, on trouve davantage de soupes froides. Mais pour nous, en octobre, on a juste trouvé une fois. Le nom de cette soupe froide : l’okroshka.
C’est un mélange de légumes (concombre, navet, pomme de terre ou carotte), d’herbes aromatiques (aneth, oignon vert, persil, cerfeuil, menthe ou estragon), de viande (saucisse fumée, bœuf, jambon ou volaille) et éventuellement de l’œuf dur, le tout coupé en petits morceaux et mélangés à du kvas bien frais.
Le kvas, ou « bière de pain » est une boisson traditionnelle issue de la fermentation naturelle du pain de seigle. C’est un liquide blanc aigre doux, légèrement alcoolisé (moins de 2°) et pétillant, qui se consomme aussi tel quel.
Dans l’okroshka, le mélange du kvas aux herbes aromatiques en fait une soupe très rafraîchissante.
Les salades
Les salades russes, c’est toujours un peu la même chose. Un mélange d’ingrédients coupés en petits cubes ou émincés, parmi lesquels : pomme de terre, carotte, chou, betterave, cornichon, concombre, oignon, pois, œuf dur, poisson, saumon, saucisse, viande, jambon… Mais surtout, le tout est abondamment et copieusement arrosé de mayonnaise !
- La salade Olivye (ou Olivier), servie à l’occasion des fêtes et du Jour de l’An, est un mélange de tous ces légumes avec de la viande et de l’œuf. Un genre de macédoine de légumes améliorée.
- La salade russe simple, toute simple, est juste un mélange de tomate, de concombre et d’oignon
- La choucroute (Kvashenaya Kapusta), un mélange de chou et de carotte râpés, avec de l’huile de tournesol cette fois, et non de la mayonnaise.
- La vinegret, à base de betterave rouge, de chou, de pomme de terre, de carotte, de concombre, d’oignon et de pois, assaisonnés à l’huile d’olive. Et oui, encore une exception.
Les plats de viande
Inexorablement, les plats de viande que l’on a dégustés étaient servis soit avec de la purée de pommes de terre, soit des nouilles, soit du riz, soit du sarrasin (grechikha), soit une combinaison de ces derniers. Quelques crudités sont ajoutées pour décorer.
Quant aux plats, en eux-mêmes, on peut citer :
- Le goulasch, un ragoût de viande de bœuf, de mouton ou de porc
- Le kotlet, des boules de viande hachée mixées avec de l’oignon et un peu de pain
- Le bifchtchek, un morceau de viande hachée servie avec un œuf par-dessus
- Le chachlyk, une brochette de viande grillée (bœuf, mouton ou porc), ou de poisson, semblable au kebab turc (le vrai de Turquie, pas le döner qu’on trouve en France).
- Le plov, un riz sauté avec de la viande de bœuf ou de mouton, des oignons et des carottes
- Le bœuf Stroganoff, des cubes de viande de bœuf farinés et sautés avec un peu de crème aigre. On y ajoute aujourd’hui des oignons et des champignons, même si ceux si ne font pas partie de la recette originale. Un plat bien plus chic, et meilleur, que tous les précédents.
Quelques desserts
Dans les cantines, il est possible de finir sur une note sucrée, même si ce n’est pas vraiment l’usage. Des pains, viennoiseries ou brioches, farcis de compotes, de fruits ou de pavot, sont souvent proposés.
On trouve aussi fréquemment des blinis sucrés. Les blinis ne sont rien d’autre que des crêpes, très semblables au crêpes de froment bretonnes, et bien différents des petits pancakes épais que l’on appelle « blini » par chez nous.
En desserts, les blinis sont servis, avec du lait concentré sucré, de la crème sûre, de la confiture ou du fromage blanc.
Pour terminer sur les repas traditionnels, rappelons que la boisson qui les accompagne est le thé noir qui se boit chaud, froid ou tiède, et non l’eau, le coca kolkhoze ou toute autre chose.
Quelques plats locaux de Sibérie et du lac Baïkal
Les pelmeni sont de petits raviolis sphériques (2 à 3 cm de diamètre) garnis de viande hachée (bœuf, porc, agneau, et il parait même qu’il en existe à la viande d’ours !) assaisonnée au poivre, à l’ail et à l’oignon. Ils peuvent se déguster nature, accompagnés d’une salade de type choucroute, de cornichons ou autres légumes saumurés, de moutarde ou de sauce aigre, ou s’intégrer à une soupe.
L’avantage, c’est qu’on peut aussi les faire cuire dans la bouilloire de sa chambre d’hôtel…
Les pozi, boozi ou manti sont une spécialité Bouriate, qui ressemble à s’y méprendre aux mémorables buuz de Mongolie. Ce sont donc de gros raviolis garnis d’une boule de viande (bœuf, porc ou mouton) mixée à quelques condiments (ail, oignon…), et servis avec un peu de sauce et une salade à côté. A la différence de leur équivalent mongol, les pozi ont un peu de goût et, sans surprise, on les a donc trouvés bien meilleurs de ce côté-ci de la frontière !
Les tcheboureki sont une spécialité Tatar, équivalent russe des khushuur mongols. Ce sont des chaussons de pâte non levée, farcis de viande hachée et assaisonnée, cuits dans l’huile bouillante.
Au lac Baikal, on mange aussi beaucoup d’omoul, un poisson endémique à la chair assez proche de celle de la truite, mais peut-être un peu plus petit.
L’omoul se consomme de multiples manières : juste grillé, ou en soupe, ou farci, ou séché, ou fumé, ou cru, ou glacé !
Les versions séchées et fumées passent très bien en apéritif ou en pique-nique.
Le saguday est le nom donné à la marinade de chair d’omoul crue, mélangée à du sel, du poivre, de l’huile, du jus de citron et de l’oignon cru. Une préparation très savoureuse qui rappelle un peu le ceviche sud-américain, idéale avec une bière ou de la vodka pour l’apéritif.
Enfin, le raskolotka est de la chair d’omoul congelée finement râpée ou cassée en petits morceaux, assaisonnée de sel, de poivre et de jus de citron. Là aussi, ça se déguste pour l’apéro.
Apéritifs et snacks
En dehors de la région du lac Baïkal, il est possible d’accompagner sa bière ou sa vodka avec des blinis salés. Plus petits et épais que les blinis sucrés, ils s’accompagnent de viande froide ou fumée, de poisson fumé, de caviar noir (œufs d’esturgeon) ou rouge (œufs de saumon ou de truite), ou de tarama.
Les légumes saumurés, gros cornichons et autres, sont également des accompagnements très populaires.
Les pirjoki sont des sortes de petits pâtés en croûte qui peuvent être farcis de plein de différentes choses : purée, chou, champignon, oignon et œuf, viande, poisson, foie, pâté, fromage… mais aussi compote ou fruits.
Pas plus gros que deux-trois bouchées, ils se mangent à tout moment : petit-déjeuner, dessert, déjeuner, entre les repas… Un snack parfait pour le train, par exemple !
Les repas dans le train
Le train a représenté pas loin d’un tiers de notre temps total passé en Russie, et par conséquent une bonne vingtaine de repas au total ont été pris dans cet univers si particulier. Pour nous qui cherchons à maintenir une alimentation variée et équilibrée, voilà un challenge particulièrement intéressant. Alors quelles options existent pour manger lorsqu’on part pour un long voyage dans un train Russe ?
A bord, le choix est malheureusement très réduit. Il y a bien le wagon-restaurant qui propose de nombreux plats, et qui s’apparente d’ailleurs plutôt à un restaurant assez chic, mais ce n’est vraiment pas donné. Les prix de celui-ci sont bien supérieurs à ce qu’on peut trouver dans toutes les cantines. Du coup, on n’a finalement jamais testé, et on ne peut donc pas s’exprimer sur la qualité des plats proposés.
A part ça, quelques vendeuses de pirojki passent de temps en temps, mais un peu trop rarement à notre goût. Et il faut garder en tête que les pirojki sont surtout des snacks. On peut bien en faire un repas une fois, mais ce n’est pas une solution viable sur le long terme.
Si on n’a rien prévu en avance, on peut aussi descendre du train pour chercher à manger lors des longs arrêts. Mais attention, le temps est souvent limité, et clairement le train russe n’attendra pas ! C’est donc un pari assez risqué que d’aller chercher un restaurant ou une cantine autour d’une gare. En revanche, il est possible de se ravitailler dans les petits magasins en gare. Mais le choix est limité aux chips, biscuits, gâteaux, nouilles instantanées et boissons sucrées de tous types. Bon , les nouilles instantanées, ça peut aller une fois ou deux, mais c’est quand même un peu tristounet comme repas !
Alors si on veut que manger reste un plaisir, même en train, il faut anticiper. Pour nous, ça avait commencé carrément longtemps à l’avance, en faisant un stock de viandes séchées et charcuteries fumées du Jura lors de notre passage en France fin août. De quoi mettre un petit goût de maison dans nos pique-niques.
Mais en Russie, on a aussi trouvé plein de choses intéressantes : des fromages, des pains, du poisson fumé, des gros cornichons, des saumures de légumes ou de poisson, des petites salades de légumes, des légumes frais, mais aussi des yaourts, des fruits, des céréales, des viennoiseries, des gâteaux…
Pour tout cela, le marché d’Irkoutsk nous a fourni une bonne base, et par la suite on s’est ravitaillés autant que possible dans les petits supermarchés trouvés au cours de nos étapes.
Côté boissons, le thé domine, et de loin ! Il est même omniprésent, les voyageurs en boivent en permanence et l’eau bouillante du samovar coule en continu. A bord du train comme en gares, on en vend, et la RZD propose même gratuitement des verres à thé traditionnels dont le porte-verre métallique est sculpté à l’effigie de la compagnie !
En même temps, avec l’interdiction de l’alcool à bord, les possibilités sont un peu limitées… Mais ça ne nous a pas empêchés de déguster un peu de vodka avec tous nos pique-nique…
Et au final, avec tous ces produits, on a l’impression d’avoir plutôt bien mangé, et bu, et conservé le plaisir du repas et de sa préparation. Car mine de rien, ça occupe un peu de se préparer son petit pique-nique. Voilà bien une autre raison pour laquelle on a adoré ce voyage en train !
2 février 2016 à 00:52
Un bon article!
Pour les soupes j’ajouterais la oukha – soupe de poissons. Chez nous la choucroute se mange avec de l’huile de tournesol et pas avec de la mayo.
Ah, je connaissais pas le coca kolkhoz!
Bon, je suis contente que la cuisine russe vous ait plu!
2 février 2016 à 10:14
Merci Iraida ! C’est bon d’avoir on retour et de savoir qu’on n’a pas raconté trop de bêtises sur ce qu’on a découvert de la cuisine Russe. A part la choucroute, qui se mange bien avec de l’huile contrairement à ce que j’ai laissé entendre. Je vais repréciser.
C’est vrai qu’on a plutôt bien aimé la nourriture là-bas, et globalement on a très envie de revenir en Russie un jour ou l’autre !
Et pour le coca kolkhoze et le Lenin’s burger, la référence, c’était ça :
http://www.dailymotion.com/video/x1p5me_mon-pere-etait-tellement-de-gauche_music
Bises à vous et bon voyage !
Au fait, on sera à Sydney le 1er avril, si par chance vous êtes dans les parages…